Notre arrivée dans la région des lacs chiliens était incertaine jusqu'au jour même en raison du volcan Calbuco qui avait déjà fait éruption deux fois au cours de la semaine précédant notre vol. Heureusement, il semblait s'être calmé un peu et en raison de vents favorables, les avions pouvaient à nouveau atterrir à Puerto Montt. Comme cette ville n'a rien de spécial à offrir, nous avons décidé de nous rendre directement à Puerto Varas, à une vingtaine de kilomètres au Nord. Nous avons également fait l'impasse sur la péninsule de Chiloé et ses célèbres églises colorées en raison de la météo désastreuse annoncée au cours des jours suivants.
Puerto Varas, située aux abords du lac Llanquihue, possède énormément de charme avec son architecture à l'influence allemande. Dans le lointain se découpent la silhouette parfaite du volcan Osorno, ainsi que celle du volcan Calbuco. Cette dernière était surmontée d'une petite fumée blanche, rappelant les impressionnantes éruptions des derniers jours.
En contemplant ce spectacle depuis les berges du lac, Cindy m'a dit: "Regarde comme c'est paisible, il n'a plus rien de menaçant ce volcan…". Quelques secondes plus tard, le Calbuco piqué dans sa fierté s'est mis à gronder et à cracher une gigantesque colonne de cendres de plus de 4 kilomètres de haut sous nos yeux ébahis! Nous sommes restés pas loin de deux heures à suivre passionnément l'évolution du nuage de cendres qui se dirigeait, heureusement pour nous, en direction de l'Argentine. Ce n'est pas tous les jours que l'on assiste à l'éruption d'un volcan!
Une fois remis de nos émotions, nous avons entrepris de visiter la ville en passant par la pittoresque église du Sacré-Coeur, perchée sur un promontoire, qui s'inspire de l'architecture de la Forêt Noire. Se balader au hasard des rues bordées de jolies demeures datant du début du 20ème siècle a été un véritable plaisir.
Comme Cindy avait ensuite rendez-vous chez le coiffeur, j'en ai profité pour longer la rive du lac avant de grimper au sommet du Cerro San Cristobal. Malheureusement, comme la végétation là-haut n'était pas entretenue, la vue était complètement bloquée. Dommage…
Le lendemain nous avons déjà quitté Puerto Varas, comme le parc national à proximité était sous des tonnes de cendres et donc inaccessible. C'est sous une pluie battante que nous avons rejoint Pucón, nichée dans un cadre magnifique entre le lac Villarica et le volcan du même nom. Il s'agit de la Mecque des férus de sport d'aventure en Amérique latine. Nous avons décidé de séjourner une semaine dans ce lieu touristique mais très agréable en raison de la météo mitigée annoncée. Nous avons logé dans une petite cabane chauffée au feu de bois que nous avons partagée en grande partie avec Kevin et Joanna, un sympathique couple d'anglais avec qui nous avons d'ailleurs décidé, six semaines plus tard, de faire un bout de route au Nord du Chili.
Durant nos trois premiers jours à Pucón, il a essentiellement plu. Du coup, nous en avons profité pour nous reposer un peu et pour aller découvrir les bains thermaux du coin. Il aura quand même fallu deux heures de bus pour atteindre les bains Geometricas au sein du Parc National Villarica, mais nous n'avons pas regretté le déplacement! Ces bains à ciel ouvert de style japonais sont constitués d'une vingtaine de piscines allant de 35°C à 45°C. Les bassins sont séparés par des passerelles en bois remontant une petite gorge jusqu'à des chutes d'eau. En raison de la saison très basse et du prix d'entrée un peu prohibitif, il y avait très peu de monde sur place et nous avons donc souvent eu le bonheur d'avoir les bassins pour nous tout seuls. Nous sommes ressortis de là requinqués!
Le lendemain, le beau temps étant à nouveau au programme, nous avons décidé d'entreprendre la visite du Parc National Huerquehue. Il existe deux sentiers de randonnée dans le parc, mais nous nous sommes malheureusement vus déconseiller le trek que nous avions initialement prévu en raison de l'abondante chute de neige des derniers jours. Nous nous sommes donc rabattus sur le sentier de Los Lagos, qui devait nous mener à trois jolis petits lacs. Pour y parvenir, nous avons dû grimper à travers une épaisse forêt de hêtres pendant près de trois heures. Deux cascades sont accessibles sur le chemin, mais elles sont particulièrement inintéressantes à cette époque de l'année. Il était également possible d'apercevoir la vallée à travers un trou de végétation ici ou là, mais malheureusement les nuages n'ont jamais voulu se décoller du volcan Villarica à l'horizon.
Une fois arrivés aux abords des lacs, nous avons trouvé la randonnée bien plus agréable. Nous avons accueilli l'arrivée du soleil avec beaucoup de plaisir et en avons profité pour casser la croûte sur les berges du Lago Verde, tout en admirant la jolie forêt d'araucacias typique du coin.
Nous nous sommes ensuite encore arrêtés vers deux autres lacs et avons savouré la sérénité des lieux. Sur six heures de marche, nous n'avons rencontré qu'un seul autre randonneur!
Pour notre cinquième jour à Pucón, nous avons choisi de nous rendre au Lago Caburgua à 25 kilomètres de là. La dénommée Playa Blanca qui le borde est supposée être de toute beauté, selon les guides de voyage. Alors comment dire… Nous avons vu mieux et plus blanc aussi!
Nous n'avons cependant pas fait le trajet en vain, car à une bonne heure de marche de là se trouvent les adorables chutes d'eau "Los Ojos de Caburgua". Un moment très rafraîchissant.
À notre retour en ville, nous avons enfin pu apercevoir le volcan Villarica en entier sans qu'il ne soit caché dernière les nuages! Nous avons donc décidé de faire une petite croisière sur le lac au soleil couchant afin de pouvoir le contempler sous toutes les coutures, mais après avoir attendu trente minutes sur le ponton, nous avons dû nous rendre à l'évidence que la saison des bateaux touristiques semblait terminée… En rentrant à l'auberge, nous n'avions donc pas d'autre choix que de louer un kayak si nous voulions profiter du spectacle depuis le lac. Après avoir embarqué un apéro de fortune, nous nous sommes donc mis à l'eau pour passer un petit moment romantique dans ce cadre enchanteur.
Nous avons gardé le plat de résistance pour la fin! Comme la récente reprise d'activité du volcan Villarica rendait son ascension impossible et que nous voulions à tout prix avoir une vue panoramique sur les environs, nous avons choisi de grimper au sommet d'un autre volcan: le Quetrupillan. Ce trek ardu de huit bonnes heures et plus de 1300 mètres de dénivelé requiert crampons, jambières et piolet et ne peut être entrepris qu'en compagnie d'un guide expérimenté. L'avantage de gravir ce volcan est d'avoir la silhouette du Villarica en toile de fond durant toute la montée! Une vingtaine d'autres volcans apparaissaient petit à petit dans le lointain à mesure que nous gravissions le versant du Quetrupillan.
Après environ trois heures de marche, il a fallu dégainer tout l'attirail pour gravir la dernière partie dans la neige.
Après cinq heures intenses d'effort, nous étions enfin arrivés au sommet! La vue d'en-haut était absolument incroyable, avec d'un côté une chaîne de volcans déjà situés en Argentine, ainsi qu'un glacier recouvrant la caldeira du Quetrupillan, et le Villarrica avec de nombreux autres volcans chiliens de l'autre. C'était tout simplement à couper le souffle!
Nous n'avons pas manqué de glisser quelques fois au cours de la descente, parce qu'il faut dire que la pente finale était quand même bien raide. Par contre, nous avons beaucoup apprécié la partie dans la forêt, car à l'aller nous l'avions traversée pratiquement dans la nuit. Une fois en-bas, il était assez impressionnant de regarder jusqu'où nous avions marché ce jour-là. Ce qui est sûr, c'est que nous ne sommes pas prêts d'oublier ce trek vraiment unique.
Nous avions ensuite prévu de nous rendre à Bariloche pour visiter le côté argentin de cette belle région des lacs, mais tout avait malheureusement été recouvert par les cendres du Calbuco, rendant les routes souvent inaccessibles et les attractions beaucoup moins attrayantes. C'est donc à regret que nous avons décidé de couper cette partie de notre voyage pour prendre un bus de nuit jusqu'à Santiago et nous envoler ensuite vers Buenos Aires, un autre grand coup de cœur!